Contact

Menu

Article

Le coronavirus, un catalyseur efficace pour les EdTech

L’année dernière, nous rapportions que le secteur de la formation était un de ceux dans lesquels les utilisateurs restaient les plus réfractaires aux technologies numériques. Cellesci ne représentaient en effet que 2 à 3% des dépenses totales consenties dans le secteur de la formation, soit moins que dans n’importe quel autre secteur de l’économie moderne.

6 juillet 2020

Dr. Kirill Pyshkin

gestionnaire de fonds, Credit Suisse Asset Management

Selon nos estimations, à l’époque, l’acceptation des offres de formation numériques devait augmenter au fil du temps et les dépenses dans les EdTech auraient dû présenter une croissance à deux chiffres chaque année. Nous ne pouvions cependant pas alors anticiper la crise du coronavirus et ses retombées sur le secteur de la formation. Comme nous le verrons dans la suite de ce Thematic Insights, l’acceptation et l’utilisation des solutions EdTech se sont nettement intensifiées et la demande a augmenté à une vitesse vertigineuse, la numérisation du secteur de la formation ayant gagné de cinq à dix ans.

Cycle d’acceptation des EdTech

Tableau 1 – Cycle d’acceptation des EdTech

Sources: Credit Suisse, «COVID-19, The (Great) Disruptor of Education & Work», avec l’aimable autorisation de EdTechX.

Le coronavirus a poussé les élèves, les étudiants et les équipes pédagogiques du monde entier à recourir aux cours numériques du jour au lendemain. Selon les observations de l’UNESCO, 191 États ont ordonné la fermeture de la totalité des établissements d’enseignement de leur pays, ce qui concerne quelque 98% des élèves et étudiants de la planète.Ceci a mené, au cours des mois passés, à une situation sans précédent, entraînant la croissance vertigineuse des offres d’apprentissage numériques. Durant la crise du coronavirus, plus de 90% des écoles et une grande partie des universités du monde entier ont fermé leurs portes et dispensé leurs cours sur les canaux numériques. À la fin avril 2020, quelque 1,7 milliard d’élèves et d’étudiants suivaient leurs cours à distance grâce à l’association de différentes plates-formes et technologies d’apprentissage, telles que Zoom, Google Classroom et Teams de Microsoft.

Croissance sans précédent du nombre d’utilisateurs

Selon le fournisseur de l’application d’apprentissage des langues Duolingo, des pics ont généralement été constatés au niveau du trafic des données dans les trois à cinq jours suivant l’introduction des mesures de confinement. Ces chiffres ont tout d’abord doublé en Chine, puis en Corée, avant de finalement exploser de 135% en Espagne, 100% en Italie et 90% aux États-Unis. Les utilisateurs de cette offre sont principalement de deux types: les élèves et étudiants recevant du matériel d’apprentissage en ligne de leurs professeurs et chargés de cours, d’une part, ainsi que les adultes pratiquant l’éloignement social à la maison et s’inscrivant à des cours, d’autre part. Coursera a indiqué une multiplication par cinq des nouvelles inscriptions à ses cours, le développement personnel rencontrant ici le plus grand succès. En tout, le chiffre des utilisateurs inscrits a été multiplié par dix.3

À l’heure où les premiers cas de coronavirus étaient découverts en Chine et où les écoles fermaient leurs portes, les plates-formes d’apprentissage numériques proposaient quant à elles leurs cours en ligne gratuitement, multipliant souvent le nombre de nouveaux utilisateurs par dix. Koolearn, GSX et Youdao, trois services de cours particuliers extrascolaires exclusivement en ligne, ont à ce moment enregistré plus de dix millions d’inscriptions à leur offre de cours gratuits. À titre comparatif, le nombre d’utilisateurs de cours payants était de quelques centaines de milliers avant la crise. Le téléchargement d’applications d’apprentissage a fait un bond à 127 millions en Chine, soit près de deux fois plus qu’avant la crise du coronavirus.4 Avec la délocalisation des cours des écoles vers Internet, la vente d’iPads a également connu une croissance soudaine en Chine, entraînant des problèmes de pénurie.5

Parallèlement à la propagation du virus dans le monde, les entreprises spécialisées dans les EdTech ont observé une augmentation du nombre de leurs utilisateurs partout sur la planète. Alors que, en mars 2020, les premières écoles fermaient, la plate-forme Seesaw, permettant aux élèves de créer un portfolio numérique de leurs travaux et de le partager avec leurs parents et professeurs, multipliait par dix son nombre d’utilisateurs en à peine un mois.6 En mars 2020 également, Google Classroom, permettant aux professeurs d’envoyer à leurs élèves différentes tâches à réaliser, ainsi que du matériel pédagogique, a doublé son nombre d’utilisateurs pour atteindre 100 millions7, alors que l’application d’apprentissage en ligne indienne Byju’s enregistrait six millions de nouveaux utilisateurs8. Au Brésil, Estácio a connu une croissance de 55% des inscriptions à ses cours en ligne durant le premier trimestre 2020. Le fournisseur américain de manuels numériques Chegg a, quant à lui, enregistré une croissance de 35% du nombre d’abonnements à ses services d’apprentissage en ligne pour le même trimestre. Aux États-Unis également, des milliers d’écoles se sont inscrites en quelques semaines à peine à Newsela, une application proposant des contenus et ressources pédagogiques attrayants au format numérique.

Un sens des responsabilités qui se reflétera dans les dividendes futurs

Apporter son soutien aux élèves, étudiants, professeurs, chargés de cours et familles grâce à l’accès gratuit aux cours, cursus, formations et produits est une obligation morale en temps de crise. La pandémie s’est, à plusieurs égards, révélée être un véritable catalyseur pour le secteur des EdTech car elle a fait découvrir aux clients des services dont ils ne pensaient pas avoir un jour besoin avant le 24 janvier 2020.

Il est encore trop tôt pour évaluer le nombre d’utilisateurs de cette offre actuellement gratuite qui finiront par devenir des abonnés payants. Cependant, même si le taux de conversion devait être bien plus faible que par le passé, ceci représenterait malgré tout une nette croissance du nombre d’utilisateurs, stimulant les chiffres d’affaires à l’avenir. Un coup d’œil sur les trois principaux acteurs du secteur en Chine indique également que les cours gratuits proposés aux élèves pendant la pandémie ont permis de réduire de 95% les frais inhérents à l’acquisition de nouveaux clients.11 En d’autres termes: ces entreprises peuvent enregistrer une nette croissance de leur chiffre d’affaires tout en améliorant leurs marges, ce qui pourrait justifier l’évolution exceptionnelle des cours des pure players du secteur des EdTech durant la crise du coronavirus.

Les EdTech, l’apprentissage du futur

Même si ce sont essentiellement les entreprises actives dans les technologies de l’éducation qui ont pu profiter d’un «soutien aussi large qu’inattendu en termes de promotion de leur image» durant la crise, la totalité du secteur enregistrait un regain d’attention et de reconnaissance lié à la pandémie. Quand bien même il reste difficile de quantifier ces effets à l’heure actuelle, la crise ne manquera probablement pas d’accélérer l’évolution du secteur et de nombreuses entreprises actives dans les technologies de l’éducation pourraient anticiper les investissements dans de nouvelles fonctionnalités. Grâce à des ressources supplémentaires et à un nombre énorme d’enseignants et d’élèves désormais plus ouverts aux apprentissages numériques, les technologies de l’éducation pourraient devenir le catalyseur d’une transformation des méthodes d’apprentissage traditionnelles.

La propagation du coronavirus a ainsi eu un effet secondaire inattendu: elle a montré aux étudiants et aux services gouvernementaux, mais aussi aux élèves et à leurs parents que de nombreuses solutions en ligne étaient aussi efficaces que les modèles d’apprentissage traditionnels – voire, dans certains cas, plus efficaces. Le coronavirus a donné de l’élan au modèle d’apprentissage hybride dans lequel la technologie ne remplace pas l’équipe pédagogique, mais la soutient. Tant dans les pays industrialisés que dans les pays émergents, des millions d’élèves et de professeurs ont eu recours aux versions gratuites des applications d’apprentissage du secteur des EdTech et ont pu tester différents formats et technologies. Lorsque les élèves et étudiants du monde entier retourneront dans leurs classes et auditoires, ils continueront sans doute à utiliser les applications les plus attrayantes. Misant de plus en plus sur la flexibilité et les atouts des modèles adaptatifs que propose l’apprentissage en ligne, ces technologies ne manqueront probablement pas de se faire une place de choix dans l’enseignement scolaire et universitaire traditionnel.

Des changements profonds dans le monde du travail

La population déconfine avec prudence et tente de s’y retrouver dans cette «nouvelle normalité». Ceci entraîne également des changements importants dans le travail de tous les jours: le monde a changé. La flexibilité au travail gagne sans cesse en importance et, avec elle, les besoins en technologies et systèmes d’automatisation. Malheureusement, la crise du coronavirus causera probablement une récession mondiale, entraînant une hausse du chômage. Il est donc plus important que jamais de se perfectionner pour pouvoir s’adapter le plus rapidement possible à la nouvelle situation. Dans ce contexte, la demande devrait fortement augmenter dans le secteur de la formation continue et de la certification.

Monde du travail: la normalité du futur

Tableau 2 – Monde du travail: la normalité du futur

Sources: Credit Suisse, diagramme issu de «COVID-19, The (Great) Disruptor of Education & Work», avec l’aimable autorisation de EdTechX.

Conclusion

Risques

  • Les évolutions politiques en matière d’éducation sont susceptibles d’avoir un impact négatif de grande ampleur sur le secteur de l’edutainment.
  • L’engagement dans de petites capitalisations peut entraîner une volatilité à court terme et générer un risque de liquidité.
  • Une concentration accrue sur des secteurs spécifiques peut parfois perdre la faveur des investisseurs.
  • Une orientation des facteurs selon un style de placement axé sur la croissance avec une surpondération particulière des petites et moyennes capitalisations comporte des risques.

Sources

1 2U Inc. (2020): T1 2020, transcription de l’appel aux résultats de Bloomberg du 30 avril 2020, page 4.
2 https://en.unesco.org/covid19/educationresponse, dernier accès le 12 mai 2020.
3 GSV Virtual Summit Series (1er programme du mercredi 1er avril).
4 https://global.chinadaily.com.cn/a/202004/06/WS5e8a6f3aa310128217284886.html, dernier accès le 11 mai 2020.
5 https://asia.nikkei.com/Spotlight/Coronavirus/China-demand-for-e-learning-bites-into-Apple-s-iPad-supply, dernier accès le 11 mai 2020.
6 https://www.theguardian.com/technology/2020/apr/24/remote-learning-classroom-technology-Coronavirus, dernier accès le 12 mai 2020.
7 https://www.bloomberg.com/news/articles/2020-04-09/google-widens-lead-in-education-market-as-students-rush-online, dernier accès le 14 mai 2020.
8 https://www.businessinsider.in/business/startups/news/byjus-adds-6-million-new-students-in-a-month-after-the-nation-goes-into-a-complete-lockdown/articleshow/75009408.cms, dernier accès le 12 mai 2020.
9 https://ir.afya.com.br/news-releases/news-release-details/afya-launches-online-solutions-help-healthcare-professionals, dernier accès le 11 mai 2020.
10 Youdao Inc. (2020): T4 2019, transcription de l’appel aux résultats de Bloomberg du 27 février 2020, pages 5, 7 et suivante.
11 https://www.brinknews.com/online-education-companies-in-china-see-a-huge-spike-in-demand-caused-by-covid-19/, dernier accès le 15 mai 2020.


Informations juridiques
Ce document ne constitue ni ne fait partie d’une offre ou invitation à acheter ou vendre des titres ou autres instruments financiers, ni à conclure une quelconque autre transaction financière; il ne constitue pas non plus une incitation ou une invitation à s’engager dans un produit, une offre ou un investissement quelconque. Les seules conditions juridiquement contraignantes applicables aux produits de placement mentionnés, notamment en ce qui concerne les risques, objectifs, frais et dépenses, sont celles qui figurent dans le prospectus, la notice d’offre, les documents de souscription, le contrat de fonds et/ou tout autre document régissant le fonds. Avant de prendre toute décision de placement, les investisseurs potentiels doivent évaluer, indépendamment et avec soin (avec leurs conseillers fiscaux, juridiques et financiers), les risques spécifiques décrits dans ces documents, les conséquences légales, réglementaires, fiscales et comptables ainsi que l’impact sur le crédit.